La charge de la preuve incombe, classiquement, à celui qui réclame l’exécution de l’obligation. C’est la lettre-même de l’article 1353 du code civil.
En droit de la construction, les articles 1792 et suivants du Code civil consacrent le principe de présomption de responsabilité à l’égard du maître d’ouvrage.
Cette présomption ne limite pas la charge de la preuve du maitre d’ouvrage à l’existence et la gravité du dommage.
Il appartient, en effet, au maitre d’ouvrage, de démontrer l’imputabilité du désordre à l’intervention du constructeur.
Cette imputabilité n’est pas présumée. Le plus souvent, l’imputabilité résulte d’une faute du constructeur.
L’absence de lien doit, à l’inverse, conduire à l’absence de responsabilité civile décennale du constructeur.
La Cour de cassation s’est à nouveau prononcée sur cette question dans un arrêt du 30 mars 2023.
Les faits :
En l’espèce, une société est propriétaire d’un bâtiment. En son sein, deux sociétés exercent une activité de vente de matériel d’agriculture et d’aliments pour le bétail. La société propriétaire confie, en 2004, la réalisation du lot couverture à un constructeur. Elle se plaint, par la suite, d’infiltrations et de condensations. Elle confie à une nouvelle société de construction des travaux de réfection de la couverture. Néanmoins, les désordres persistent.
En conséquence, le maître d’ouvrage et les exploitants assignent le constructeur ayant procédé aux travaux de reprise et son assureur de responsabilité civile décennale.
La Cour d’appel de Riom :
Elle rejette les demandes du maître d’ouvrage sur le fondement de la responsabilité civile décennale. La Cour estime qu’il n’était pas démontré que les désordres étaient consécutifs à l’intervention de l’entreprise.
La Cour de cassation :
La Haute Cour abonde dans le sens des juges d’appel. Elle indique : « Ayant retenu qu’il n’était pas démontré que les travaux de reprise des désordres existants, lesquels s’étaient révélés inefficaces, avaient pu aggraver ou causer de nouveaux désordres, de sorte qu’ils ne constituaient pas la cause des désordres actuels, qui n’étaient que la suite du sinistre initial, la cour d’appel a pu en déduire qu’en l’absence de lien d’imputabilité entre les travaux inefficaces et les désordres auxquels ils mettent un terme, la responsabilité de plein droit du constructeur n’était pas engagée ».
Ainsi, la garantie décennale d’un constructeur ne peut être mise en œuvre que pour des désordres qui sont imputables à son intervention.
La présomption de responsabilité civile décennale n’implique pas l’absence de preuve du lien d’imputabilité. La charge de la preuve du lien d’imputabilité incombe au créancier de l’obligation, c’est-à-dire au maître d’ouvrage.
Cass. civ. 3, 30 mars 2023, n° 22-10.299
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