Malfaçons en VEFA : comment faire valoir vos droits ?

Comment faire valoir vos droits en cas de malfaçons en VEFA ?

Acheter un bien immobilier sur plan, c’est souvent l’espoir d’un logement moderne, bien conçu, livré clé en main. C’est ce que promet la VEFA – la Vente en l’État Futur d’Achèvement. Pourtant, ce rêve peut vite tourner au cauchemar lorsque des malfaçons s’invitent dans l’équation. Fissures, mauvaises finitions, défauts d’étanchéité… ces désordres de construction, parfois apparents dès la livraison, parfois révélés bien plus tard, placent les acquéreurs dans une situation inconfortable. À qui s’adresser ? Quelles garanties invoquer ? Sous quels délais ? Les questions sont nombreuses et les réponses variables. Comment faire valoir vos droits en cas de malfaçons en VEFA ? Clément Poirier Avocat vous explique. 

 

Qu’est-ce qu’une VEFA ?

Strictement encadrée par le droit de la construction et de l’habitation, la Vente en l’État Futur d’Achèvement (VEFA), ou « vente sur plan », est un contrat spécifique à l’immobilier neuf. Par ce biais, l’acheteur s’engage à acquérir un bien qui n’est pas encore construit ou en cours de construction.

La VEFA suppose :

  • un acte authentique signé chez le notaire ; 
  • un paiement échelonné, en fonction de l’état d’avancement du chantier ; 
  • une garantie financière d’achèvement (GFA) obligatoire, fournie par le promoteur ; 
  • un transfert de propriété progressif, au fur et à mesure de l’exécution des travaux.

 

Elle se déroule généralement en plusieurs étapes :

1ère étape : signature d’un contrat de réservation ; 

2ème étape : signature de l’acte de vente définitif chez le notaire ; 

3ème étape : réalisation de la construction sous le contrôle du promoteur ; 

4ème étape : livraison du logement avec un procès-verbal et remise des clés.

 

La Vente en l’État Futur d’Achèvement présente des avantages (logement neuf, normes récentes, frais réduits), mais elle comporte aussi des risques : retards, défauts d’exécution ou malfaçons. 

Qu’est-ce qu’une malfaçon en VEFA ?

Une malfaçon en VEFA correspond à un défaut d’exécution ou un désordre qui affecte le logement acheté. Ces défauts peuvent résulter d’erreurs de conception, de défauts dans la mise en œuvre ou d’une négligence sur le chantier. Ils peuvent être visibles dès la réception ou apparaître après l’entrée dans les lieux.

Parmi les plus fréquents, on retrouve :

  • des fissures sur les murs ou les plafonds ; 
  • des infiltrations d’eau ; 
  • des défauts d’isolation thermique ou phonique ; 
  • une plomberie défectueuse ; 
  • des sols mal posés ; 
  • des revêtements de mauvaise qualité ; 
  • etc.

 

Ces désordres doivent être distingués des défauts de conformité, qui concernent un écart entre ce qui a été promis dans le contrat (plans prévus, matériaux utilisés) et ce qui a effectivement été livré.

 

Quelles sont les garanties légales en cas de malfaçons VEFA ?

Lors d’une VEFA, plusieurs garanties légales protègent l’acquéreur. Elles sont encadrées par le Code civil et le Code de la construction et de l’habitation et s’appliquent de plein droit à compter de la réception du logement. Toutefois, leur mise en œuvre nécessite une action de l’acquéreur, qui doit signaler les désordres dans les délais impartis.​

Garantie de parfait achèvement (GPA)

Attention, la garantie de parfait achèvement ne lie pas directement le promoteur et l’acquéreur. Elle s’applique entre le maître d’ouvrage (le promoteur) et les entreprises qui ont réalisé les travaux, lors de la réception du chantier.

 

Cela signifie que l’acquéreur ne peut pas se prévaloir de cette garantie directement. En pratique, il doit signaler au promoteur les désordres apparents (notamment sur le fondement de l’article 1642-1 du Code civil), et c’est ensuite au promoteur d’agir contre les entreprises concernées.

Bon à savoir

Le promoteur reste juridiquement responsable vis-à-vis de l’acquéreur de livrer un logement conforme et exempt de défauts apparents. Si les désordres signalés ne relèvent pas d’un défaut d’entretien ou de l’usure normale, il lui appartient de mobiliser les garanties applicables auprès des entreprises.

  • Durée : 1 an à compter de la réception des travaux
  • Objet :  tous types de désordres (hors usure normale ou défaut d’entretien)
  • Démarche : notification au promoteur par lettre recommandée avec accusé de réception accompagnée de photos, d’explications, et si possible, d’un devis

 

Même si elle ne s’applique pas directement à l’acquéreur, la GPA joue un rôle central dans la résolution des désordres précoces : elle constitue un levier contractuel pour le promoteur et donc un outil indirect de réparation pour le bénéficiaire final du logement. 

 

Garantie biennale

La garantie biennale concerne les équipements dissociables du bâti, c’est-à-dire ceux qui peuvent être enlevés sans détériorer la structure du logement (robinetterie, volets roulants, chaudière, chauffages, etc.).

  • Durée : 2 ans à compter de la réception
  • Objet : bon fonctionnement des équipements
  • Démarche : notification au promoteur par lettre recommandée avec justificatifs

 

Garantie décennale 

C’est la garantie la plus connue : elle couvre pendant 10 ans les désordres qui affectent la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination.

  • Durée : 10 ans à compter de la réception
  • Objet : fissures structurelles, infiltrations majeures, affaissement, défauts de fondation, etc.
  • Démarche : mise en cause du constructeur et déclaration à l’assurance dommages-ouvrage

Le saviez-vous ? 

Cette garantie est automatiquement transférée aux acquéreurs suivants en cas de revente du bien.

Que se passe-t-il lorsque vous actionnez une garantie ?

Lorsqu’une garantie est activée, le promoteur ou le constructeur a l’obligation d’intervenir pour remédier au désordre constaté. Cela peut impliquer :

  • la réparation ou le remplacement de l’élément concerné (dans le cadre de la garantie biennale ou de parfait achèvement) ; 
  • la réalisation de travaux de reprise pour supprimer les désordres qui affectent la structure ou la destination du bien (dans le cadre de la garantie décennale) ; 
  • Une indemnisation rapide par l’assureur dommages-ouvrage si les conditions sont réunies.

 

Le promoteur dispose généralement d’un délai raisonnable (souvent 30 à 90 jours selon la nature du désordre) pour organiser les réparations. En cas de refus ou d’inaction, une action en justice peut être engagée.

 

L’assurance dommages-ouvrage : un levier d’indemnisation

Souscrite par le promoteur au bénéfice des acquéreurs, l’assurance dommages-ouvrage permet une prise en charge rapide des réparations, sans qu’il soit nécessaire d’attendre une décision judiciaire sur les responsabilités.

Elle est obligatoire dans toute VEFA. Elle joue un rôle essentiel dans la protection des acheteurs face aux malfaçons graves.

Obligatoirement souscrite avant l’ouverture du chantier, elle peut être déclenchée à l’expiration de la GPA, soit un an après la réception (sauf si le désordre revêt la gravité décennale durant cette période). Elle couvre, pendant une durée de 10 ans, les désordres qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination..

Bon à savoir : 

En cas de sinistre, l’assureur doit vous répondre dans un délai de 60 jours et vous proposer une indemnisation dans les 90 jours.

Quelles démarches en cas de malfaçons ?

En présence de malfaçons, il est essentiel d’agir de manière réfléchie et rapide pour faire valoir vos droits.

Étape 1 : La livraison

Le jour de la remise des clés, inspectez minutieusement le logement et notez tous les désordres apparents dans le procès-verbal de livraison. 

Le saviez-vous ? 

Si vous émettez des réserves, vous pouvez consigner 5 % du prix auprès d’un notaire, bien que les conditions soient plus strictes que pour un contrat de construction de maison individuelle.

Étape 2 : Après la livraison

Après la livraison, l’acquéreur dispose d’un délai d’un mois pour signaler par écrit au promoteur les vices apparents non mentionnés dans le procès-verbal de livraison, conformément à l’article 1642-1 du Code civil.

Étape 3 : Mise en demeure

Si le promoteur ne réagit pas à vos courriers, adressez-lui une mise en demeure formelle. Ce courrier est souvent indispensable avant toute action judiciaire.

Étape 4 : Action en justice

En cas d’inaction persistante, vous pouvez saisir le tribunal judiciaire. Un avocat en droit de la construction pourra analyser votre situation et, en fonction des difficultés rencontrées, vous proposer d’engager une action en justice. À ce stade, il est par exemple possible d’envisager un référé-expertise pour établir l’existence des malfaçons, leur étendue, les éventuelles imputabilités, les moyens d’y remédier et les coûts associés. 

 

Que peut-on obtenir par une action en justice fondée sur une garantie légale ?

Lorsque vous engagez une action en justice dans le cadre d’une garantie légale (parfait achèvement, biennale ou décennale), le juge peut :

  • ordonner la réalisation des travaux de reprise ; 
  • contraindre le promoteur ou constructeur à intervenir sous astreinte ; 
  • ordonner une expertise judiciaire pour confirmer l’étendue des désordres ; 
  • fixer une indemnisation complémentaire en cas de retard ou de gêne subie (troubles de jouissance, frais de relogement, etc.).

 

Et si aucune garantie ne s’applique ?

En dehors des garanties légales, l’acquéreur peut engager la responsabilité contractuelle de droit commun du promoteur, notamment en cas de désordres qui surviennent avant la réception ou qui ne relèvent d’aucune garantie spécifique. Cette action est soumise à un délai de prescription de 10 ans à compter de la réception des travaux, conformément à l’article 1792-4-3 du Code civil.​

Dans ce cadre, vous pouvez obtenir des dommages et intérêts, l’exécution forcée du contrat, voire la résiliation judiciaire dans les cas les plus graves.

L’intervention d’un avocat en droit de la construction est fortement conseillée pour qualifier les désordres, choisir le bon fondement juridique et porter la demande devant la juridiction compétente.

Tableau récapitulatif des garanties et des délais d’action

 

Garantie

Durée

Point de départ

Couverture

Parfait achèvement

1 an

Réception des travaux

Désordres apparents signalés par l’acquéreur au promoteur (recours du promoteur contre les entreprises

Garantie biennale

2 ans

Réception des travaux

Équipements dissociables (robinetterie, volets, etc.)

Garantie décennale

10 ans

Réception des travaux

Dommages affectant la solidité ou l’usage du logement

Assurance dommages-ouvrage

10 ans 

Réception ou découverte des désordres

Préfinancement des réparations relevant de la garantie décennale

Bon à savoir

Ces délais sont des délais de forclusion, ce qui signifie qu’une fois écoulés, vous perdez définitivement votre droit d’agir, sauf cas très exceptionnels. Dans tous les cas, une action en justice (comme une assignation en référé) peut permettre d’interrompre ces délais, mais uniquement pour les désordres mentionnés expressément. Au-delà, vous risquez une forclusion.

Être confronté à des malfaçons en VEFA suppose de réagir avec méthode et en connaissance de ses droits. Trop souvent, les acquéreurs découvrent les désordres lorsqu’ils emménagent, ou même plusieurs mois plus tard, sans savoir à qui s’adresser ni comment faire valoir les garanties qui leur sont pourtant acquises. Garantie de parfait achèvement, garantie décennale, assurance dommages-ouvrage… ces mécanismes existent pour vous protéger. Ils sont prévus par la loi et prennent effet dès la réception du bien, mais attention, c’est à vous de les actionner. En effet, vous devez signaler les désordres dans les délais impartis et suivre les formalités requises. Il faut parfois insister, négocier, relancer, et, dans certains cas, engager une action en justice. Notre conseil : ne laissez pas traîner une situation problématique. Car au-delà des désordres visibles, c’est aussi la qualité de votre investissement, votre confort de vie et votre sécurité juridique qui sont en jeu.

Besoin d’une assistance personnalisée ? Clément Poirier, avocat en droit de la construction, vous accompagne dans toutes vos démarches liées aux malfaçons en VEFA. Contactez-nous !