Quelles conséquences en cas de constat de risque d’exposition au plomb erroné ou manquant ?
Lorsqu’on vend ou loue un bien immobilier ancien, un certain nombre de diagnostics doivent être effectués. Parmi eux, le constat de risque d’exposition au plomb (CREP) revêt une importance particulière. Instauré pour protéger les occupants — et notamment les jeunes enfants — contre les dangers du plomb dans les peintures, ce diagnostic peut devenir un véritable enjeu juridique.
En effet, en cas d’oubli, d’erreur ou d’insuffisance du CREP, les conséquences peuvent être lourdes : remise en cause de la vente, indemnisation de l’acquéreur, nullité du contrat, mise en cause du diagnostiqueur ou du vendeur… Les litiges liés à ce diagnostic sont plus fréquents qu’on ne le pense, notamment lorsque la présence de plomb est découverte après la transaction ou que des désordres affectent le bien.
Que contient exactement le CREP ? Quand est-il obligatoire ? Quelles sont les conséquences en cas de diagnostic défaillant ? Clément Poirier Avocat fait le point sur le constat de risque d’exposition au plomb.
Le CREP : un diagnostic obligatoire pour les logements anciens
Créé par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, le constat de risque d’exposition au plomb est un diagnostic qui vise à repérer la présence de plomb dans les revêtements des bâtiments à usage d’habitation construits avant le 1er janvier 1949.
Le saviez-vous ?
Auparavant, on parlait d’ERAP (État des Risques d’Accessibilité au Plomb), remplacé par le CREP en 2006.
Ce diagnostic a une double finalité : prévenir le saturnisme, notamment chez les enfants en bas âge, et permettre au futur occupant ou acquéreur de connaître l’état de conservation du logement afin d’anticiper d’éventuels travaux.
En droit immobilier, le CREP est obligatoire et doit être joint au dossier de diagnostic technique (DDT) :
- lors de la vente d’un bien à usage d’habitation datant d’avant 1949 ;
- lors de la location d’un tel logement ;
- pour les parties communes des immeubles collectifs (dans les zones à risque ou sur arrêté préfectoral).
Bon à savoir :
Pour les logements construits après le 1er janvier 1949, le CREP n’est pas requis car les peintures au plomb ont été progressivement interdites à partir de cette date.
Que contient un CREP et comment est-il réalisé ?
Le CREP doit être établi par un diagnostiqueur certifié, qui inspecte les différentes surfaces susceptibles de contenir du plomb telles que les portes, les fenêtres, les plinthes, les murs, les plafonds, etc. au moyen de la technique de fluorescence X.
Le saviez-vous ?
La fluorescence X est une technique d’analyse non destructive qui permet de mesurer la concentration de plomb dans les revêtements sans altérer les surfaces. Le diagnostiqueur utilise un appareil portatif qui émet des rayons X vers le matériau testé (peinture, enduit, etc.). En fonction de la réaction du plomb aux rayonnements, l’appareil évalue sa concentration en milligrammes par centimètre carré (mg/cm²). Cette méthode est rapide, précise et adaptée aux bâtiments anciens. Elle permet de repérer les zones à risque même si le plomb est recouvert par plusieurs couches de peinture, à condition que la profondeur reste détectable.
Le rapport remis doit ainsi mentionner :
- la localisation des revêtements qui contiennent du plomb ;
- le taux de concentration en mg/cm² ;
- l’état de conservation des matériaux ;
- les facteurs de dégradation du bâti, le cas échéant.
Bon à savoir :
Lorsque le diagnostic met en évidence la présence de plomb dégradé, le propriétaire doit transmettre le CREP à l’Agence régionale de santé (ARS). Cette transmission est obligatoire et peut entraîner des injonctions de travaux ou une déclaration d’insalubrité.
Durée de validité du CREP : attention aux erreurs
L’une des erreurs fréquentes consiste à recycler un CREP périmé ou inadapté à une nouvelle mise en location ou à une vente. Ce manquement peut ouvrir la voie à des recours.
Situation | CREP requis ? | Validité | Risques en cas d’oubli ou erreur |
Vente bien < 1949 | Oui | Illimitée (si négatif) | Nullité de la vente, vice caché, réduction du prix |
Location bien < 1949 | Oui | 6 ans (même si négatif) | Sanctions civiles, indemnisation du locataire |
Parties communes < 1949 | Oui (si arrêté préfectoral) | 1 an ( reconduction possible sous réserve de nouvelle visite) | Responsabilité du syndic, risque d’insalubrité |
Quelles conséquences en cas de CREP manquant ou erroné ?
L’absence, l’erreur ou l’insuffisance du Constat de risque d’exposition au plomb peuvent être lourdes de conséquences. Selon la nature de la transaction (vente ou location), différentes actions peuvent être engagées. Le point commun : la responsabilité du vendeur ou du bailleur est quasi systématiquement engagée, et celle du diagnostiqueur peut l’être également, de manière directe ou indirecte.
Dans le cadre d’une vente immobilière, l’acquéreur peut :
- demander l’annulation de la vente pour vice du consentement, notamment si la présence de plomb a été dissimulée ou omise volontairement ;
- invoquer un vice caché, si la présence de plomb rend le bien impropre à son usage ou en diminue fortement la valeur (article 1641 du Code civil) ;
- solliciter une réduction du prix ou des dommages et intérêts ;
- engager la responsabilité du diagnostiqueur, via une action du vendeur ou de l’acquéreur, en cas de diagnostic erroné ou incomplet.
Dans le cadre d’une location, le locataire peut :
- agir contre le bailleur pour manquement à son obligation de délivrance conforme (articles 1719 et suivants du Code civil) ;
- demander des réparations aux frais du bailleur, voire une réduction du loyer ou la résiliation du bail ;
- saisir les services de l’État (mairie, ARS) en cas de danger pour la santé publique, notamment si le logement est insalubre ;
- en cas de préjudice corporel (ex. : saturnisme), engager une action en responsabilité civile contre le bailleur ;
- mettre indirectement en cause le diagnostiqueur, via le bailleur, en cas de rapport erroné.
Bon à savoir :
L’absence de CREP n’est pas une infraction pénale en soi. Cependant, lorsqu’un danger pour la santé est caractérisé, notamment si une personne est intoxiquée par le plomb, la responsabilité du propriétaire peut être engagée pénalement, notamment pour :
- mise en danger de la vie d’autrui (article 223-1 du Code pénal) ;
- blessures involontaires (article 222-19 du Code pénal) ;
- infractions aux règles d’hygiène et de sécurité (articles L.1331-22 et suivants du Code de la santé publique).
Checklist : 5 réflexes pour éviter les litiges liés au diagnostic plomb obligatoire
1 – Vérifiez la date et la validité du CREP
Assurez-vous que le diagnostic plomb obligatoire est récent et conforme aux obligations légales selon la nature de la transaction (vente, location ou parties communes). En effet, un CREP périmé peut entraîner des contestations.
2 – Faites réaliser le diagnostic par un professionnel certifié
Pour garantir la fiabilité du rapport, faites appel à un diagnostiqueur certifié et reconnu par un organisme habilité, qui utilise les méthodes réglementaires (fluorescence X).
3 – Analysez attentivement le rapport et ses annexes
Examinez la localisation des zones plombées, les taux de concentration et l’état de conservation des revêtements. Soyez vigilant quant aux recommandations et aux obligations de travaux éventuels.
4 – Transmettez le CREP aux parties concernées
Lors d’une vente ou d’une mise en location, remettez le diagnostic à l’acquéreur ou au locataire. Si le diagnostic révèle la présence de plomb dans des peintures dégradées ou facilement accessibles, le CREP doit être transmis à l’Agence Régionale de Santé (ARS). Cette obligation concerne les situations où l’état du bâti favorise l’exposition au plomb, notamment pour les enfants. Elle peut entraîner un suivi sanitaire ou des mesures d’insalubrité.
5 – Consultez un avocat en droit immobilier
Avant de conclure la transaction, faites vérifier le dossier par un avocat en droit immobilier. Son expertise vous permettra d’anticiper les risques juridiques, d’intégrer des clauses protectrices dans le contrat et d’éviter les contentieux coûteux.
Le rôle de l’avocat en cas de contentieux lié au CREP
Qu’il s’agisse d’un diagnostic erroné, d’une absence de CREP ou d’un danger sanitaire avéré, l’intervention de l’avocat en droit immobilier est déterminante pour sécuriser la procédure et défendre les intérêts de son client.
Il peut intervenir à plusieurs niveaux.
En amont, pour vérifier la régularité du dossier de diagnostic technique (DDT), conseiller sur les obligations du vendeur ou du bailleur, et anticiper les risques juridiques dans la rédaction des actes ou contrats.
En cas de litige, pour :
- analyser les conséquences juridiques d’un défaut ou d’une erreur de diagnostic ;
- identifier les responsabilités engagées (vendeur, bailleur, diagnostiqueur, syndic, etc.) ;
- solliciter une expertise judiciaire auprès du juge si des vérifications techniques s’imposent ;
- accompagner son client lors des opérations d’expertise, produire les pièces nécessaires et défendre sa position ;
- mettre en demeure la partie adverse et engager, selon la situation, une procédure amiable ou contentieuse.
L’accompagnement de l’avocat permet aussi d’éviter les erreurs de qualification, de respecter les délais légaux pour agir et de défendre efficacement vos droits devant le tribunal si la voie judiciaire devient nécessaire.
On le perçoit parfois comme une simple formalité technique mais en réalité, le constat de risque d’exposition au plomb est une obligation légale dont l’omission ou l’irrégularité peut être à l’origine de plusieurs contentieux. Vendeur, bailleur, diagnostiqueur… chacun peut voir sa responsabilité engagée si le diagnostic est absent, erroné ou incomplet. Pour l’acquéreur ou le locataire, les enjeux sont tout aussi sérieux : exposition à un risque sanitaire, perte de valeur du bien, charges imprévues, difficulté à obtenir réparation…
Dans ces situations, agir seul est risqué. Les délais pour intenter une action sont courts, la charge de la preuve est stricte et la qualification juridique des faits suppose une analyse fine du dossier. Aussi, l’avocat en droit immobilier joue un rôle essentiel. Il vous aide à sécuriser une vente ou une mise en location, prévenir les litiges, ou encore défendre vos intérêts en cas de contentieux, notamment lorsque la situation nécessite une expertise technique ou une action en justice.
Vous êtes confronté à une absence de CREP, à un diagnostic contestable ou à un litige en cours ? Clément Poirier Avocat vous accompagne. Contactez-nous pour une première consultation personnalisée.